Gisella Perl nait vers 1900 dans une famille juive hongroise dans une ville qui deviendra roumaine après la première guerre mondiale. Elle aime étudier et ne se contente pas de l’éducation de base. Son père craint que cela l’éloigne de la religion, mais elle arrive à le convaincre du contraire. Elle fait donc des études de médecine et devient gynécologue obstétricienne. Elle épouse un chirurgien et ils ont un garçon et une fille.
Lorsque débute la seconde guerre mondiale, toute la région est sous dictature roumaine, mais aussi tchécoslovaque. Les Hongrois alliés des nazis reprennent la région et les juifs sont alors mis dans des ghettos avant d’être déportés. Lors de l’entrée des Allemands dans la ville en 1944, Gisella a juste le temps de confier sa fille Gabriella à des voisins non juifs, avant que toute la famille ne soit arrêtée.
Ils sont tous déportés à Birkenau, le camp annexe d’Auschwitz. Elle décrira plus tard un ciel fermé par les nuages de suie et rougeâtre d’un côté du camp.
Elle est dès son arrivée « sélectionnée » en tant qu’apte au travail et répond à un appel pour trouver des médecins. Ce qu’elle ne sait pas, c’est qu’elle va devoir travailler sous les ordres du Dr Mengele, l’ange de la mort. Il attend d’elle qu’elle aide à accoucher les femmes enceintes. Mais le lieu où ils officient n’a d’hôpital que le nom. Il n’y a ni lit, ni médicament, ni instruments, ni anesthésie. « L’hôpital n’est que le siège d’horribles expérimentations sans aucun anesthésiant et de toute façon la finalité reste la mort après d’interminables souffrances. Ce lieu s’avère plus dangereux que les chambres à gaz.
À partir du moment où Gisella a compris ce qui attendait les femmes enceintes et leur bébé, contre toutes ses convictions humaines et religieuses, elle propose d’avorter en cachette, la nuit, toutes ces pauvres femmes, pour leur sauver la vie. Elle le fait à mains nues, souvent sales et sans anesthésiant ni désinfectant sur des couchettes crasseuses. Lorsque la grossesse est trop avancée, elle provoque l’accouchement. L’enfant, prématurément sortie, ne survit que quelques instants.
« Personne ne saura jamais ce que ça signifiait pour moi de détruire ces bébés, mais si je ne l’avais pas fait, la mère et l’enfant auraient été cruellement assassinés » dira-t-elle plus tard dans un livre. C’est près de 3000 avortements qu’elle devra pratiquer dans cet enfer.
En plus de son travail de chirurgienne le jour avec le Dr Mengele, elle aide ses codétenues comme elle peut pour toutes sortes de soins.
En 1945, elle continue ses actions dans le camp de Bergen-Belsen où elle a été transférée. Ce sont les Français qui libèrent le camp, elle est en train de réaliser un accouchement.
À son retour, elle s’empresse de rechercher sa famille. Son mari est mort quelques jours avant la libération, ses parents ont subi les chambres à gaz, mais la plus grosse souffrance sera d’apprendre la mort de son fils. Elle tente alors de se suicider par poison sans y parvenir. Une fois sauvée et remise sur pied, elle va aux USA où elle regroupe des fonds pour les réfugiées et fait des conférences. Truman adopte un projet de loi créant un statut de réfugié. Gisella obtiendra, ainsi, après de longs interrogatoires sur ses liens avec les nazis, la citoyenneté américaine. Elle arrive aussi après une longue bataille à reprendre son travail de gynécologue, dans un hôpital à Manhattan, en 1948. À l’entrée du bloc, elle fait toujours la même prière : « Dieu, tu me dois une vie – un bébé vivant ». Dans le même temps, elle écrit aussi un livre qui la fait connaître mondialement.
En 1978, elle décide d’aller en Israël pour honorer sa promesse à son mari de le rejoindre là-bas. Elle y retrouve sa fille Gabriella et découvre un petit-fils. Elle a aussi la chance de retrouver sa sœur Rose. Elle continue à exercer son métier en Israël.
Son petit-fils témoignera dans une interview que parfois une femme tombait à ses pieds, pour la remercier de l’avoir sauvé.
Elle est morte en 1988, honoré par Le Jerusalem Post comme « l’ange d’Auschwitz ».
En 2003, un téléfilm sera réalisé sur son histoire : « Out of the Ashes »
Image de Jeff Jacobs de Pixabay
Parce que les vies sont courtes et que savoir d’où l’on vient est essentiel, pensez à interroger vos anciens sur leurs histoires.
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