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Presque deux ans jour pour jour après l’abolition de l’esclavage, Sarah Breedlove est la première enfant de sa famille à naître libre dans la plantation de cotons de Louisiane ou ses parents ont gardé un emploi de métayer. On est en 1867 et les conditions de vie dans la plantation restent rudes même pour des employés libres. C’est ainsi que ses deux parents vont mourir successivement, et la laisser orpheline dès l’âge de 7 ans.

Elle rejoint alors sa sœur aînée et son mari dans le Mississipi, et devient dans le même temps domestique. Seulement, le mari est un charmant homme qui la maltraite. Alors, elle profite de la première occasion venue pour partir. Il s’appelle Moses McWilliams et Sarah l’épouse à 14 ans. Ils ont une fille, Lelia. Moses meurt deux ans plus tard, Sarah a 20 ans. Elle part, avec sa fille, rejoindre ses frères dans le Missouri et devient blanchisseuse.

Elle fréquente l’église méthodiste locale et chante avec des femmes de la bourgeoisie noire. Cela lui donne l’envie de s’élever socialement. Elle prend donc aussi des cours du soir.

À l’époque, dans les quartiers pauvres, il n’y a que rarement l’eau courante. Les gens se lavent épisodiquement le corps en entier et encore moins le cuir chevelu. Pour les femmes noires aux cheveux longs et crépus, le cuir chevelu est donc mis à rude épreuve entre pellicules et infections. Pour elles, l’injonction de beauté, qui depuis toujours est basé sur l’esthétique blanche, les incite à utiliser des traitements agressifs pour se lisser les cheveux. Sarah fait partie de ces femmes qui perdent ainsi leurs cheveux et utilisent parfois des perruques. 

Scurlock Studio (Washington, D.C.) (photographers)., Public domain, via Wikimedia Commons

Elle cherche donc des produits et trouve ceux d’Annie Malone. En très peu de temps, ses cheveux repoussent et elle s’engage de plus en plus dans la vente de ces produits miracles en devenant un agent de la société d’Annie, Poro. C’est à ce moment-là que lui vient l’idée de créer son propre business et avec l’aide d’un pharmacien de Denver chez qui elle travaille, elle apprend la chimie et développe sa gamme de produits capillaires et cosmétiques.

On est en 1906 et elle vient d’épouser Charles Joseph Walker (il est son troisième mari, le second mariage s’étant achevé en seulement 9 ans). Selon les sources, on le trouve journaliste ou publicitaire, mais en tout cas, il a des connaissances utiles pour faire la promotion d’un produit et va participer aux débuts de l’activité de sa femme. Elle quitte alors Annie Malone. Elle vend tout d’abord en porte-à-porte, comme elle a appris avec les produits Poro, mais ce sont les produits « Madam C.J. Walker ». 

Elle rencontre un temps des difficultés juridiques avec son ancienne employeuse qui l’accuse de plagiat, mais qui n’aura finalement pas gain de cause. Les deux femmes auront une ascension parallèle pendant longtemps. Elles se livreront à une rude concurrence qui ne sera arrêtée que par des soucis financiers d’Annie, notamment dus à un divorce difficile.

Après le père, la fille, c’est A’Lelia qui va commencer à se charger de la vente pendant que Sarah et son mari vont traverser le pays pour développer son entreprise. Après deux ans, ils s’installent à pittsburgh où ils ouvrent un salon de coiffure avec sa boutique, mais aussi une école « Lelia College of Beauty Culture ». Cette école forme les futures employées de l’entreprise, permettant une opportunité d’ascension sociale pour de nombreuses femmes noires. En 1919, ils auront formé plus de 25 000 femmes, agents actifs de l’entreprise.

Image de couverture See page for author, Public domain, via Wikimedia Commons

En 1910, elle déménage son entreprise à Indianapolis. Elle comprend une usine, un salon d’esthétique, une école et aussi un laboratoire. L’équipe de direction s’est élargie, et à chaque échelon de son entreprise, les embauches sont prioritairement féminines, dans une volonté de promotion sociale. 

En 1913, Sarah divorce de C.J. Walker. Cela n’entrave en rien la croissance de l’entreprise. Lelia, qui travaille étroitement avec sa mère depuis des années, arrive à la convaincre de s’implanter dans le quartier d’Harlem à New York, où la culture afro-américaine est en pleine expansion. C’est aussi l’année d’une nouvelle tournée internationale vers l’Amérique du Sud pour Sarah.

See page for author, Public domain, via Wikimedia Commons

Avec tout ce développement, Sarah devient millionnaire. Elle s’offre des villas, des voitures et montre de façon très ostentatoire ses richesses. Mais elle utilise son argent aussi pour aider les causes auxquelles elle croit :

  • N’ayant pas pu bénéficier d’une éducation, elle fait des dons aux écoles.
  • Elle aide de nombreuses associations pour les droits des femmes et les droits des afro-américains comme National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) qu’elle aide notamment lors d’une campagne contre les lynchages.
  • Elle devient de plus en plus active politiquement, tel le défilé de protestation silencieux des nègres et la visite de la maison blanche en 1917 avec les leaders pour demander une loi contre les lynchages.
  • Elle défend aussi les droits des soldats afro-américains revenus de la première guerre mondiale.
  • Elle finance des orphelinats et des maisons de retraite.
  • Elle se retrouve à assumer des conférences par ses liens avec les militants.
  • Elle devient vice-présidente de la ligue nationale pour l’égalité des droits qui favorise tous les aspects de la vie des noirs, dont la morale, l’éducation et l’industrie.
Ainsi, cette femme d’origine très modeste a su s’élever parmi les plus grands sans trahir ses valeurs et en essayant de tirer avec elle ses pairs, tout en étant une femme noire dans une société ségrégationniste et profondément sexiste.

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Pour cet article, j’ai dû faire appel à pas mal de sources différentes, car contradictoires et donc difficile de se faire une idée claire : 

https://histoireparlesfemmes.com/2021/06/16/madam-cj-walker-femme-daffaires/

https://macoiffeuseafro.com/blog/lincroyable-histoire-de-madam-c-j-walker/

https://www.britannica.com/biography/Madam-C-J-Walker

https://fr.wikipedia.org/wiki/Madam_C._J._Walker

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/toute-une-vie/madam-c-j-walker-1867-1919-la-femme-qui-transforma-son-peuple-en-une-generation-7941083

Enfin, si vous souhaitez entrer un peu plus dans son univers, j’ai bien aimé la mini-série que Netflix lui a consacrée sous le nom de « Self made ». Le premier rôle est interprété par une remarquable actrice, Octavia Spencer. Au-delà de ses nombreuses récompenses pour son second rôle dans « la couleur des sentiments » (2011), elle aurait mérité que cette histoire soit un film pour des récompenses en tant que premier rôle. Encore une personne incroyable pour qui rien n’est donné en tant que femme afro-américaine, même aujourd’hui.

Je vous rappelle que le temps passe vite. Alors n’oubliez pas d’interroger vos proches pour connaître leur histoire. Je peux vous aider.

Catégories : Challenge AZ

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