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Les objets sont utiles, mais portent aussi la mémoire de moment de notre histoire familiale. Il n’est pas nécessaire que les objets soient vieux pour porter en eux le souvenir d’un être aimé. Parfois, cela peut même être un objet ordinaire ou laid pour qui ne connaît pas son histoire.

Laissez-moi vous raconter une histoire avant que de vous montrer un objet.

Toute petite et jusqu’à mes 21 ans, j’ai eu la chance de côtoyer mon arrière-grand-mère. C’était une femme ordinaire, dans sa blouse à fleur. Elle vivait chez ma grand-tante la majorité du temps, mais passait parfois un mois ou deux chez ma grand-mère. C’est à cette occasion le plus souvent que je pouvais la rencontrer. Petite et menue, elle ne ressemblait pas à ma grand-mère avec ses rondeurs. Vers la fin de sa vie, elle ne se dépareillait pas de sa canne pour se déplacer à petits pas. L’été, elle rajoutait à sa panoplie un chapeau de paille pour sortir.

Elle tentait de se rendre utile en reprisant les chaussettes que ma grand-mère lui avait gardées en prévision de son passage et papotait à tout bout de champ.

À l’époque, je ne me rendais pas compte de la valeur de ces bavardages incessants, et je tentais plus de m’éclipser pour me soustraire à sa vue plutôt que de prendre des notes. Heureusement, ma grand-mère et ma grand-tante se sont chargée d’écouter pour moi et peuvent maintenant me transmettre son histoire.

Nous la surnommions affectueusement mémère et elle portait dignement ce surnom. La vie ne l’avait pas épargnée et dans ses vieux jours le corps petit à petit se recourbait un peu. Sa vue petit à petit lui faisait défaut et les travaux de couture n’étaient plus à sa portée. Elle s’occupait comme elle pouvait et une chose lui plaisait, c’était la lecture de son roman-photo Nous Deux.

Pour ceux qui ne connaissent pas, il s’agit d’un petit roman qui au lieu d’être en texte est sous forme de bande dessinée.

Cependant, pour faire plus simple des acteurs sont mis en scène, et ce sont des photos qui se succèdent avec bulles et annotations.

Pour mon arrière-grand-mère qui n’avait jamais été à l’école, c’était une façon de pouvoir « lire ».

Oui, mais rappelez-vous, sa vue commence à diminuer avec l’âge… Alors, si l’aiguille est trop petite pour coudre, les détails du magazine s’évaporent. Alors elle commence à utiliser une petite loupe, puis une plus grosse. Partout où elle va, il y a une loupe, parfois jolie et élégante, parfois fonctionnelle et pratique.

Au moment de son décès, je voulais quelque chose qui lui ait appartenu. Cet objet fut une loupe, et j’ai donc pu récupérer celle qui traînait chez ma grand-mère pour les venues de mémère. Elle est plutôt moderne et pas très jolie, mais ses yeux se sont échinés sur cette loupe et sa main a tenu sa poignée.

Elle a lu tant qu’elle a pu ses Nous Deux et quand ses yeux ne lui ont donné que du flou, sa vie est devenue bien triste.

Cette loupe, c’est pour moi un petit bout de mémère devant sa fenêtre lisant son Nous Deux et nous racontant ses histoires.




Venez nous parler de votre histoire !


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